Précision sur "la suite Volpini" suite...

Publié le par ebft


On peut classer les pièces de l’œuvre gravé de Gauguin en trois séries principales : les zincographies, les bois, souvenirs du premier voyage à Tahiti, les bois du deuxième voyage à Tahiti.


Les zincographies sont des gravures
sur zinc; elles ont été exécutées en 1889.


M. Charles Chassé dans son livre sur Gauguin et le groupe de Pont-Aven (Paris Floury 1921, p. 68) parlant de cet album «où pêle-mêle se côtoient des études bretonnes, arlésiennes et martiniquaises», pense que les gravures bretonnes ne doivent pas être postérieures à 1888. Dans une note, au bas de la même page, il rapporte l'opinion de M. de Monfreid qui croit que les zincographies ont été exécutées à Paris au retour de la Martinique et avant que Gauguin soit allé en Bretagne faire la courte apparition qui précéda son départ pour la Provence. Il ajoute que vraisemblablement les dessins bretons de cette collection «datent de son tout premier séjour en Bretagne». M. de Monfreid avec lequel nous avons discuté cette question de dates, a reconnu qu'il avait fait erreur et que les zincographies représentant des Arlésiennes, (il y en a au moins une dans l'album), ne pouvaient dater que de 1889, c'est-à-dire postérieurement au séjour célèbre de Gauguin à Arles avec Van Gogh. Alors comment supposer que les autres dessins sur zinc soient d'une époque différente et antérieure ? Il est vraisemblable que Gauguin a exécuté les 11 pièces de l'album, toutes ensemble, soit à Paris chez Emile Schuflenecker, soit au Pouldu en 1889, d'après des souvenirs de ses différents séjours à Pont-Aven, à la Martinique et à Arles. En tous cas M. Sérusier, qui a connu Gauguin dès 1888, se rappelle fort bien avoir vu les zincographies en 1889 au Pouldu où elles ornaient les salles de l'auberge de Mlle Marie Henry, qu'il habitait en même temps que Gauguin ; il croit se souvenir qu'elles avaient été tirées à une trentaine ou à une cinquantaine d'épreuves tout au plus par Ancourt, l'imprimeur-lithographe bien connu, qui plus tard fit tirer par son habile ouvrier Stern un grand nombre des lithographies de Toulouse-Lautrec. M. Emile Bernard que nous interrogions également à propos de cet album, nous a montré des zincographies en noir et en couleurs qu'il dessinait à cette époque. Ce tout jeune homme (il avait une vingtaine d'années alors que Gauguin avait dépassé la quarantaine) était plein d'intelligence, d'invention et d'habileté. Il nous a dit que c'est lui qui avait eu l'idée d'obtenir sur le zinc ces lavis grenus qu'on remarque sur ses planches et sur celles de Gauguin, en prenant un pinceau et en diluant avec de l'eau l'encre sur le zinc (voir les Laveuses, les Bretonnes à la barrière, Misères humaines, Joies de Bretagne, Pastorales Martinique, les Cigales et les Fourmis).

L'album des zincographies de Gauguin tirées sur papier jaune safran fut mis en vente pour 20 francs dans un «café chantant» décoré pour la circonstance du nom de Galerie Volpini, à l'Exposition de 1889 où Gauguin présenta ses tableaux avec un petit catalogue dont M. de Monfreid a conservé des exemplaires. Quant aux planches de zinc, Gauguin les donna à M. Amédée Schuffenecker qui dit les avoir vendues à M. Vollard. Celui-ci cependant ne croit pas les posséder ; il a vu pour la première fois les épreuves sur papier jaune chez Portier auquel Gauguin en avait confié quelques séries pour les vendre. Plus tard, entre les deux voyages à Tahiti, M. Vollard vit paraître une très médiocre réimpression sur simili-japon dont le chiffre de tirage nous est inconnu. Les séries sur papier jaune sont devenues rares ; la réimpression même ne se rencontre pas souvent.

Gauguin utilisera la gravure sur zinc, plus tard, pendant son séjour en France (1893-1895), entre ses deux voyages à Tahiti, pour exécuter un souvenir d'un de ses plus beaux tableaux tahitiens : Ja Orana Maria ; une Vierge Maorie, nimbée, portant sur son épaule un enfant Jésus nimbé lui aussi. Une autre gravure est sur pierre ; elle est dessinée au crayon, à la plume et au lavis ; elle est paru en 1894 dans l'Estampe originale, la belle publication de M. André Marty ; elle reproduit à peu près exactement le célèbre tableau : Manao Tupapau (elle pense au revenant).

Marcel Guérin, L'œuvre gravé de Gauguin, 2 vol., éd. H. Floury, Paris, 1927.

Publié dans gauguin

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article
A
De nombreuses études plus récentes ont bien précisé les circonstances et la chronologie de cette suite Volpini qui sont des gravures sur zinc (moins cher que le cuivre), c'est à dire à la pointe sèche, l'eau-forte, etc. et non pas des lithographies.
Répondre
E
<br /> <br /> Merci beaucoup pour ces précisions justifiées et votre intervention experte, l’article est maintenant modifié en conséquence. Vos remarques sont toujours les bienvenues et permettent ainsi<br /> d’améliorer le contenu de notre site.<br /> <br /> <br />
E
<br /> <br /> Merci beaucoup pour ces précisions justifiées et votre intervention experte, l’article est<br /> maintenant modifié en conséquence. Vos remarques sont toujours les bienvenues et permettent ainsi d’améliorer le contenu de notre site.<br /> <br /> <br /> <br />